EL RHAZOUI, Zineb



Interview par Thomas MAHLER, Le Point, 20/10/2016

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Le voile est pour vous « l’une des formes les plus rétrogrades de discrimination et de réification des femmes ». Mais les études et les sociologues nous disent que les femmes salafistes qui portent le jilbab en France le font volontairement. Certains vont même jusqu’à parler d’un féminisme musulman…


Je peux concevoir que celles qui portent aujourd’hui le voile, intégral ou non, n’ont pas été forcées manu militari à le faire. Si cela avait été le cas, il y aurait des plaintes, car en France, des lois permettent de se défendre. En revanche, de là à dire que c’est un choix libre, il y a quand même tout un monde… La féministe algérienne Wassyla Tamzali a vu, au cours de la décennie noire en Algérie, des centaines de milliers de femmes faire ce « choix libre » d’un seul coup. C’est quand même curieux. Wassyla Tamzali explique ainsi que le voile n’est pas un choix, mais un consentement. Peut-on réellement parler de « choix libre » lorsqu’on sait que dans plusieurs pays dans le monde, si vous ne portez pas le voile, vous êtes fouettée sur la place publique ? Pour moi, il deviendra un habit comme les autres le jour où les Saoudiennes pourront porter le voile le lundi, un jean le mardi et se mettre en bikini le mercredi. Ce jour-là, je dirai « OK ». Mais tant qu’il y a des endroits où les femmes sont couvertes de la tête au pied et qu’elles sont fouettées par la police religieuse si elles ne le font pas, qu’on ne vienne pas me parler de choix.

Celles qui parlent de choix en France sont en réalité soit des femmes qui ont consenti à porter le voile, soit des militantes de l’idéologie islamique qui empruntent les outils dialectiques des droits de l’homme et des libertés individuelles pour justement imposer la négation des droits de l’homme et de la liberté. Cet habit est un uniforme en Arabie saoudite et dans d’autres pays. En tant que féministe, je ne peux que farouchement être opposée au voile, intégral ou foulard simple, car sa fonction reste la même : couvrir la femme, l’enlaidir pour diminuer les érections inopinées. C’est une insulte à la fois pour la femme, perçue comme un objet sexuel à recouvrir, et l’homme, vu comme un primate en rut qui ne peut pas s’empêcher de violer dès qu’il voit une touffe de cheveux. Mais attention, cette aversion pour le voile ne veut pas dire que je dénie la dignité humaine à toutes les femmes qui le portent. Parce que derrière le voile, il y a un être humain, qui a des droits. Mais ces femmes ont des droits en tant qu’individus et citoyennes, et non pas en tant que ninjas couverts de la tête au pied. Je fais référence au discours du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), qui a recours à une ruse sémantique en parlant systématiquement de « femmes musulmanes », alors qu’en réalité, si elles ont été rejetées, c’est à cause de l’idéologie qu’elles représentent et non pas parce qu’elles sont nées dans une culture musulmane.

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