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RENAUD


Mistral Gagnant

A m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi
Et regarder les gens tant qu'y en a
Te parler du bon temps qu'est mort ou qui r'viendra

En serrant dans ma main tes p'tits doigts
Pis donner à bouffer à des pigeons idiots
Leur filer des coups d' pieds pour de faux
Et entendre ton rire qui lézarde les murs
Qui sait surtout guérir mes blessures
Te raconter un peu comment j'étais mino
Les bonbecs fabuleux qu'on piquait chez l' marchand
Car-en-sac et Minto, caramel à un franc
Et les mistrals gagnants

A r'marcher sous la pluie cinq minutes avec toi
Et regarder la vie tant qu'y en a
Te raconter la Terre en te bouffant des yeux
Te parler de ta mère un p'tit peu
Et sauter dans les flaques pour la faire râler
Bousiller nos godasses et s' marrer
Et entendre ton rire comme on entend la mer
S'arrêter, r'partir en arrière
Te raconter surtout les carambars d'antan et les cocos bohères
Et les vrais roudoudous qui nous coupaient les lèvres
Et nous niquaient les dents
Et les mistrals gagnants

A m'asseoir sur un banc cinq minutes avec toi
Et regarder le soleil qui s'en va
Te parler du bon temps qu'est mort et je m'en fou
Te dire que les méchants c'est pas nous
Que si moi je suis barge, ce n'est que de tes yeux
Car ils ont l'avantage d'être deux
Et entendre ton rire s'envoler aussi haut
Que s'envolent les cris des oiseaux
Te raconter enfin qu'il faut aimer la vie
Et l'aimer même si le temps est assassin
Et emporte avec lui les rires des enfants
Et les mistrals gagnants
Et les mistrals gagnants



Toujours debout

Toujours vivant, rassurez-vous
Toujours la banane toujours debout
J'suis retapé, remis sur pieds
Droit sur mes guibolles ressuscité
Tous ceux qui tombent autour de moi
C'est l'hécatombe, c'est Guernica
Tous ceux qui tombent, tombent à tour de bras
Et moi je suis toujours là

Toujours vivant, rassurez-vous
Toujours la banane, toujours debout
Il est pas né ou mal barré
Le crétin qui voudra m'enterrer
J'fais plus les télés, j'ai même pas internet
Arrêté de parler aux radios, aux gazettes
Ils m'ont cru disparu, on me croit oublié
Dites à ces trous du cul, j'continue d'chanter

Et puis tous ces chasseurs de primes
Paparazzis en embuscade
Qui me dépriment, et qui n'impriment
Que des ragots, que des salades
Toutes ces rumeurs sur ma santé
On va pas en faire une affaire
Et que celui qui n'a jamais titubé
Me jette la première bière

Toujours vivant, rassurez-vous

Toujours la banane, toujours debout
Il est pas né ou mal barré
L'idiot qui voudrait m'remplacer
Je dois tout l'temps faire gaffe
Derrière chaque buisson
A tous ces photographes
Qui vous prennent pour des cons
Ceux-là m'ont enterré
Un peu prématuré
Dites à ces enfoirés j'continue d'chanter

Mais je n'vous ai jamais oublié
Et pour ceux à qui j'ai manqué
Vous les fidèles, je reviens vous dire merci
Vous m'avez manqué vous aussi
Trop content de vous retrouver
Je veux continuer nom de nom
Continuer à écrire et à chanter
Chanter pour tous les sauvageons

Toujours vivant, rassurez-vous
Toujours la banane, toujours debout
Il est pas né ou mal barré
Le couillon qui voudra m'enterrer
Depuis quelques années, je me suis éloigné
Je vis près des lavandes sous les oliviers
Ils m'ont cru disparu, on me croit oublié
Ces trous du cul peuvent continuer d'baver
Moi sur mon p'tit chemin j'continue d'chanter


En cloque

Elle a mis sur l' mur

Au dessus du berceau

Une photo d'Arthur

Rimbaud

Avec ses cheveux en brosse

Elle trouve qu'il est beau

Dans la chambre du gosse

Bravo

Déjà les petits anges

Sur le papier peint

J' trouvais ça étrange

J' dis rien

Elle me font marrer

Ses idées loufoques

Depuis qu'elle est

En cloque

Elle s' réveille la nuit

Veut bouffer des fraises

Elle a des envies

Balaises

Moi, j' suis aux petits soins

J' me défonces en huit

Pour qu'elle manque de rien

Ma petite

C'est comme si j' pissais

Dans un violoncelle

Comme si j'existais

Plus pour elle

Je m' retrouve planté

Tout seul dans mon froc

Depuis qu'elle est

En cloque

Le soir elle tricote

En buvant d' la verveine

Moi j' démêle ses pelotes

De laine

Elle use les miroirs

A s' regarder dedans

A s' trouver bizarre

Tout le temps

J' lui dit qu'elle est belle

Comme un fruit trop mûr

Elle croit qu' je m' fous d'elle

C'est sûr

Faut bien dire s' qu'y est

Moi aussi j' débloque

Depuis qu'elle est

En cloque

Faut qu' j' retire mes grolles

Quand j' rentre dans la chambre

Du petit rossignol

Qu'elle couve

C'est qu' son petit bonhomme

Qu'arrive en Décembre

Elle le protège comme

Une louve

Même le chat pépère

Elle en dit du mal

Sous prétexte qu'il perd

Ses poils

Elle veut plus l' voir traîner

Autour du paddock

Depuis qu'elle est

En cloque

Quand j' promène mes mains

D' l'autre côté d' son dos

J' sens comme des coups de poings

Ça bouge

J' lui dis "t'es un jardin"

"Une fleur, un ruisseau"

Alors elle devient

Toute rouge

Parfois c' qu'y m' désole

C' qu'y fait du chagrin

Quand j' regarde son ventre

Puis l' mien

C'est qu' même si j' devenais

Pédé comme un phoque

Moi j' serai jamais

En cloque